Les créateurs de Beeper Mini, l’application qui amène iMessage sur Android, revendiquent la possibilité de rendre l’expérience de chat entre les smartphones Android et iPhone plus sécurisée et enrichie de plus de fonctionnalités. La mise en avant de cet argument, qui a motivé la mise sur pied de Beeper Mini, fait suite à la coupure d’accès par Apple des fonctionnalités de l’application aux utilisateurs. iMessage se veut être la chasse gardée de l’entreprise selon que Tim Cook lui-même répond à qui veut bénéficier de la totalité de ses fonctionnalités : Achetez-vous un iPhone. C’est d’avis de certains observateurs de l’obstruction à la concurrence et à l’innovation qui mérite une législation pour faire plier le géant technologique.
« Beeper Cloud et Mini sont des applications qui doivent exister. Nous les avons mises sur pied. Nous allons continuer à les faire fonctionner. Nous les partagerons largement », lance l’un des créateurs de l’application qui soutient « qu’Apple facilite l'envoi de messages non sécurisés et non chiffrés entre les iPhone et les Android. Gardez cela à l'esprit. Pour les utilisateurs de l'iPhone, Beeper Mini représente un énorme progrès en matière de sécurité et de confidentialité. Ceux-ci ont tout intérêt à encourager leurs amis possesseurs de smartphones Android à utiliser Beeper. »
Beeper engrange de plus en plus de soutiens qui partagent l’avis selon lequel Apple affiche une posture contre la concurrence et l’innovation. Désormais, le géant technologique est dans le viseur de législations susceptibles de le faire plier sur cette question du droit de l’existence d’une solution comme Beeper Mini.
« Beeper a témoigné lors d'une audition que j'ai organisée sur l'impact du pouvoir monopolistique sur l'innovation et nous voyons maintenant cet impact en temps réel. Apple bloque leur application qui donne plus de choix aux utilisateurs. Nous devons adopter ma législation bipartisane pour mettre fin à cet abus anticoncurrentiel », écrit un sénateur du Minnesota.
Beeper Mini : le résultat d’une ingénierie inverse d’iMessage dont Apple ne veut pas comme Microsoft aurait pu s’opposer aux efforts de rétro ingénierie de sa suite Office par Apple
Apple est aujourd'hui l'une des entreprises les plus importantes et les plus rentables de la planète. Mais, au début des années 2000, l'entreprise luttait pour sa survie. Le système d'exploitation Windows de Microsoft était en pleine ascension et Microsoft a tiré parti de sa domination pour s'assurer que tous les utilisateurs de Windows s'appuient sur sa suite Microsoft Office (Word, Excel, Powerpoint, etc.).
Les utilisateurs d'Apple - une petite minorité d'utilisateurs d'ordinateurs - qui souhaitaient échanger des documents avec le monde beaucoup plus vaste des utilisateurs de Windows étaient dépendants du système d'exploitation Office de Microsoft pour Macintosh (qui fonctionnait de manière incohérente avec les documents Office de Windows, avec des comportements inattendus tels que la corruption des documents de sorte qu'ils n'étaient plus lisibles, ou l'affichage partiel ou incorrect de certaines parties des documents échangés).
Les utilisateurs d'Apple pouvaient également demander aux utilisateurs de Windows d'exporter leurs documents Office vers un format de fichier "interopérable" tel que Rich Text Format (pour le texte). Néanmoins, ces formats étaient eux aussi incohérents et sujets aux erreurs, car ils étaient interprétés de différentes manières par différents programmes, tant sur les systèmes Mac que sur les systèmes Windows.
Apple aurait pu supplier Microsoft d'améliorer ses offres Macintosh, ou l'entreprise de normaliser ses produits phares au sein d'un organisme de normalisation comme OASIS ou ISO. Mais Microsoft n'avait guère de raison de faire une telle chose : ses produits Office constituaient un avantage concurrentiel considérable et, malgré le fait qu'Apple était trop petit pour constituer une véritable menace, Microsoft avait la réputation de se donner beaucoup de mal pour éliminer les concurrents potentiels, y compris les ordinateurs Macintosh et les ordinateurs fonctionnant avec le système d'exploitation GNU/Linux.
Apple n'a pas compté sur la bonne volonté et la générosité de Microsoft. L’entreprise s’est plutôt appuyée sur la rétro-ingénierie. Après sa campagne publicitaire Switch de 2002 destinée à amener les clients potentiels d'Apple d'ignorer les mythes sur la difficulté d'intégrer les Macs dans les flux de travail Windows, elle a intensifié le travail sur sa suite de productivité iWork. Lancée en 2005, elle comprenait déjà un traitement de texte (Pages), un tableur (Numbers) et un programme de présentation (Keynote). Il s'agissait d'applications riches en fonctionnalités, avec de nombreuses innovations qui ont dépassé les outils Microsoft en place, mais cette supériorité n'aurait pas suffi à assurer l'adoption d'iWork, car les meilleurs tableurs du monde ne sont d'aucune utilité si les personnes avec lesquelles vous devez travailler ne peuvent pas les ouvrir.
Ce qui a fait le succès d'iWork - et a contribué à relancer Apple - c'est le fait que Pages pouvait ouvrir et enregistrer la plupart des fichiers Word, que Numbers pouvait ouvrir et enregistrer la plupart des fichiers Excel et que Keynote pouvait ouvrir et enregistrer la plupart des présentations PowerPoint. Apple n'a pas obtenu cette compatibilité grâce à la coopération de Microsoft. L’entreprise l'a obtenue malgré l’absence de coopération de Microsoft.
Fondée en 2020, l’équipe de Beeper travaillait à l’origine sur un agrégateur de messagerie multiplateforme, qui a été renommé Beeper Cloud lors du récent lancement de Beeper Mini. Ce dernier utilise une nouvelle technologie qui permet aux utilisateurs d'Android d'envoyer des SMS aux utilisateurs d'iMessage comme s'ils envoyaient également des SMS depuis un iPhone. Cela signifie des bulles bleues dans la discussion de groupe, pas des bulles vertes.
L'entreprise assure que Beeper Mini se connecte directement aux serveurs d'Apple, comme le ferait un « vrai » iMessage. « C'est la grande avancée. Nous ne sommes plus un intermédiaire », explique Éric Migicovsky, cofondateur et PDG de Beeper, en parlant de la suppression des serveurs Mac de relais.
Il note : « les recherches que nous avons menées consistent en une rétro-ingénierie du protocole iMessage, jusqu'à la couche la plus basse du protocole. Ainsi, Beeper Mini n'utilise pas un serveur Mac comme relais, comme c'est le cas pour toutes les autres applications - il dispose d'un Mac Mini dans un centre de données quelque part. Lorsque vous envoyez un message, vous l'envoyez en fait au Mac Mini, qui le transmet ensuite à iMessage. En revanche, Beeper Mini est une implémentation native du protocole iMessage ». Il a expliqué que Beeper n'a pas accès au contenu des messages des utilisateurs et que les messages ne sont pas envoyés en texte clair.
« Le message que vous envoyez depuis un téléphone Android à l'aide de Beeper Mini est chiffré de bout en bout jusqu'au destinataire. Il est chiffré sur l'appareil avant de quitter l'application. Les clés de chiffrement sont exclusivement stockées sur votre appareil dans le système de fichiers Android, à l'instar d'autres applications telles que Signal et WhatsApp. L'application ne se connecte à aucun serveur de Beeper, mais uniquement aux serveurs d'Apple, comme le ferait un "vrai" iMessage », affirme la startup.
Source : Blog Beeper
Et vous ?
Pour ou contre l’existence de solutions comme Beeper Mini ? Êtes-vous d’avis que cette application a « sa raison d’être » comme le soulignent les créateurs ?
Partagez-vous les avis selon lesquels Apple affiche un comportement anticoncurrentiel qui mérite une législation pour le faire plier ?
Quelles pourraient être les conséquences à long terme pour les développeurs tiers qui tentent d’intégrer des services exclusifs à des plateformes spécifiques ?
Quel impact cette décision pourrait-elle avoir sur les utilisateurs d’Android qui souhaitaient utiliser iMessage via Beeper Mini ?
Devrait-il y avoir des réglementations pour garantir la compatibilité interplateforme des services de messagerie, ou les entreprises devraient-elles avoir le droit de protéger leurs services exclusifs ?
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Le , par Patrick Ruiz
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